Le fonctionnement biologique de l’être humain s’accorde naturellement au rythme du jour et de la nuit, comme à celui des saisons. Mais il se régule aussi par des donneurs de temps sociaux tels les heures de réveil, de repas, le cycle d’activité et les routines de la semaine, etc. Ces derniers synchronisateurs nous influencent d'ailleurs aujourd'hui plus que les précédents.
Se pose ainsi la question de l’adéquation de nos rythmes sociaux et biologiques, avec en toile de fond l’accélération de notre mode de vie, bousculant souvent notre physiologie.
Jusqu'où notre corps peut-il s'adapter à cette nouvelle cadence et préserver la synchronisation de ses rythmes, essentielle à son fonctionnement ?
Ce qui a changé dans nos rythmes de vie
La fin du repos hivernal
En occident, la majorité d’entre nous n’organise plus sa vie sur le rythme de production agricole : notre organisation sociale nous conduit aujourd'hui à être productif de façon constante sur l’année. Ainsi, nous travaillons autant - souvent plus - l’hiver que l’été, profitant des congés estivaux pour nous reposer. Ce qui bouscule l’adéquation entre notre rythme social et notre rythme biologique, qui nous aurait conduit à nous reposer plus l’hiver que l’été (journées plus courtes, température plus faibles).
L’impératif de l’immédiateté, qui raccourcit nos temps de récupération
Cette évolution de notre rythme de vie se trouve encore renforcée par un impératif plus récent d’immédiateté. L’accès rapide aux informations grâce à Internet et la communication instantanée via la généralisation des smartphones a encore modifié notre rapport au temps. Il est attendu de nous une disponibilité plus élevée ainsi qu’une réponse rapide, que ce soit de notre sphère personnelle ou professionnelle. Ce qui a très souvent pour effet de réduire le nombre et la durée de nos moments de repos. Nos cycles d'activité-repos se tendent ainsi progressivement au quotidien.
L'organisation actuelle vacance-travail, seul vrai cycle activité-repos vers lequel nous semblons nous acheminer - et qui peut également se trouver également bouleversée par ce besoin d'être disponible - nous permet-elle de nous ressourcer au long terme ?
Un cadre plus citadin et dense
Enfin, le contexte d'une vie citadine pour beaucoup d’entre nous, ainsi que la multiplication des espaces de travail collectifs, propices aux échanges, présentent cependant aussi l'inconvénient de limiter les moments de calme récupérateurs.
Quels impacts pour ma santé ?
Une mobilisation excessive de nos ressources qui nous use progressivement
Le risque, dans ce contexte, est vivre dans un état d’alerte (certes utile de façon ponctuelle pour fuir ou se battre) quasi permanente, mobilisant en excès la partie orthosympatique de notre système nerveux. Pour certains, il s’agit même d’un lifestyle : sans cette trépidation, la vie parait vide.
Et, si nous ne prenons pas soin de se ménager des temps de récupération, les hormones du stress sont produites en continu pour faire face à la constance des demandes et des changements. Elles épuisent notre corps par les modifications physiologiques inadaptées qu’elles induisent (accélération du rythme cardiaque, ralentissement du transit, etc.).
Cet état d’hyper vigilance, souvent entretenu par des remontants à chaque baisse de régime, finit par impacter nos ressentis, qu’ils soient émotionnels (réaction inadaptée) ou physiologiques (ex : besoin de sommeil).
Ces effets physiologiques et psychiques sont majorés par la sédentarité ou l’excès d’activité sportive.
Et provoque une désynchronisation de nos rythmes biologiques internes
De cette déconnexion avec l’expression de nos besoins découle une absence du respect de l’alternance activité-repos, une réduction du sommeil et in fine, une récupération insuffisante pour le système immunitaire et la régénération cellulaire.
C'est l’ensemble des rythmes biologiques qui se désynchronise, favorisant diabète, obésité, dépression, cancer. Il est même étudié aujourd’hui, la possibilité que cette désynchronisation installée puisse modifier l’expression des gènes de l’horloge biologique centrale et périphériques (situées dans les organes), altération épigénétique qui pourrait être transmise par la mère au fœtus.
Et si, comme disait Ghandi, « il y a plus à faire dans la vie que d’augmenter sa vitesse » ?
L'enjeu aujourd'hui est de trouver son rythme sans vivre en décalage avec les autres.